Madison's diary [Quelques extraits]

About D

Spoiler:

Maintenant que je vois les choses avec du recul, j'aurais pu m'échapper. J'aurais pu fuir cette chasse infernale, cette nuit horrible dont je ne décrirais pas les évènements en détail. Mais quelque chose, autre que la peur encore me maintenait sur place. J'étais clouée sur place, paralysée, pétrifiée et plus encore, et ce fut ma seule erreur. Mais je ne sais pas pourquoi, mon instinct de survie me fit défaut, noyé sûrement, par ces deux dernières années où j'étais choyée, assistée et protégée. Et ce soir là, ce fut le réveil de quelque chose. Je soupçonne une certaine lassitude de la vie d'avoir convaincu ma raison de ne pas fuir, peut-être pour expérimenter ce soir là un sentiment nouveau. La terreur. Terreur je dois avouer, mêlée à un sentiment d'excitation. Enfin, quelque chose venait perturber le quotidien trop bien réglé qu'était devenue mon existence. Et maintenant que j'écris ces mots, malgré l'horreur et l'appréhension, malgré le traumatisme, cette rencontre avec le destin a réanimé quelque chose en moi. Je m'en veux tellement de ce que je suis devenue en arrivant à New York, que j'en oublie parfois de haïr D.

Parfois je fais des cauchemars, où je ne suis jamais sortie de cette planque. J'étais portée disparue, et toujours introuvable. J'étais devenue l'ombre de moi-même et je ne parlais plus. Dans ces cauchemars, il faisait de moi une sorte d'esclave, contrainte de satisfaire le moindre de ses désirs. Il ne se lassait jamais de me voir pleurer, supplier, puis m’effondrer. Je devenais un fantôme, ne répondant plus que machinalement, vidée de toute vie et toute conscience. Puis, je me réveille en sueur, et j’ai l’impression qu’il est là, tapi dans le noir, et qu’il m’observe et surtout, qu’il se délecte de la peur qu’il m’inspire encore.
Mais j’ai décidé de me reprendre en main. Cela fait trop longtemps que je n’écoute plus mon corps et que je vis à un rythme qui, bien que rapide, me ramollit. Je reprends le sport, et aussi la danse. Je reprends tout ce que j’avais abandonné pour l’élite du lycée. Je récupère peu à peu mes réflexes de shoppeuse enragée et même mon frère a remarqué que je redevenais la petite teigneuse que je pensais avoir laissée en Californie. Jeff aussi a constaté un changement, mais lui sait que c’est dû au traumatisme. Il n’est pas contre, mais ne semble pas non plus à cent pourcents pour. Je fais en sorte que si je suis amenée à me trouver de nouveau dans une situation d’agression, je puisse me défendre, et non pas bêtement rester paralysée. Je me sens un peu plus forte, et je mets D au défi de me retrouver. Je lui ferai comprendre qu’on ne peut pas s’attaquer à Madison Evans et s’en tirer en rigolant.

Il se tenait là, dans mon salon, à MA soirée. Pire que tout, il accompagnait cette garce d’Alannah. Enfin, je ne peux plus trop médire à son sujet, maintenant qu’elle est à l’hôpital. Je me rends bien compte que sa convalescence actuelle, c’est aussi un peu de ma faute. S’il n’était pas animé par le désir de vouloir me tuer ou me voir souffrir, peut-être qu’il ne serait pas venu, peut-être qu’il n’aurait pas manipulé Alannah comme. Cette pourriture a failli la tuer. Pourquoi s’acharne-t-il ainsi ? Je ne lui ai rien fait, si ce n’est l’affront d’avoir arraché son espèce de masque. Je n’arrive pas non plus à croire qu’il ait menacé Clay. Il n’en a pas le droit. S’il cherche tant que ça une victime, qu’il s’attaque directement à moi, plutôt que de chercher à tout détruire autour de moi.
Je suis quand même contente qu’il n’ait pas causé plus de dégâts à ma soirée. Personne n’a l’air de se rappeler du « mystérieux jeune homme » qui accompagnait Alannah, et c’est tant mieux. Le secret sur la chute d’Alannah resterait entre ma meilleure ennemie, mon agresseur et moi. Tout le monde en tout cas, se rappellera de cette soirée, alors que j’aimerais moi en oublier une partie. Surtout cette danse qu’il a réussi à m’imposer et cet interrogatoire. Il ne sait pas ce qui m’était arrivé, et je ne sais pas si c’est tant mieux ou si c’est grave.
Tout ce que je peux dire, c'est qu'il m'a fait une réelle déclaration de guerre. Il me croit disposée à obéir, et je me sens bouillir quand je l'entends m'appeler "sa propriété." Il est dangereux, et je rentre dans un jeu qui me coûtera sûrement la vie, mais je ne peux plus accepter d'être seulement une poupée. Dans mes visions de l'avenir, je ne suis la subordonnée de personne, je n'obéis à personne, je suis une artiste, je suis libre. Alors si je veux vraiment devenir une actrice, je ferai mieux maintenant de montrer à tout le monde que je n'ai plus peur de rien. Rien.

About Jeff

Spoiler:

Au fond quand j'y repense, je ne vis plus que pour lui. Autrefois un tel constant m'aurait écoeuré, m'aurait rendu folle de ne plus être maîtresse de mes actes, mais aujourd'hui; je me rends compte que ça me réjouit. J'ai du mal à saisir parfois l'importance qu'il a pour moi, tellement elle est grande, profonde et complexe. Je me sens mal loin de lui, presque incomplète. Mon seul plaisir, c'est de le retrouver après quelques jours de séparation, et de me blottir dans ses bras. Il exerce un pouvoir sur moi, mais pour rien au monde je ne voudrais m'en défaire. Même quand il use de ce pouvoir pour me heurter. Mais bon, le pouvoir sans abus, n'a pas de charme... Je suppose que c'est pareil de son côté, du moins, je l'espère. Je prie tous les jours pour qu'il ait besoin de moi autant que j'ai besoin de lui. Malgré les doutes, les disputes et les temps durs, on a toujours tenu. On est fort. Il me fait croire en moi. Parfois ça me fait peur de constater que je suis à ce point accro à quelqu'un d'autre que moi. J'ai un besoin de savoir toujours ce qu'il fait, ce qu'il pense, ce qu'il compte faire et comment il va. Tout ce qui le concerne me met dans un était pas possible.
Et si ce n'est pas de l'amour, alors je ne sais pas ce que l'amour est...

Ces derniers temps, ça ne va pas fort. On n'arrive plus à se parler sans s'engueuler, on ne se voit plus, et quand on se voit, il est distant désinvolte et cassant. Je pensais que mon agression aurait renforcé quelque chose entre lui et moi, qu'il aurait encore plus besoin de me protéger, mais il n'en est rien. Depuis quelques jours, il est vraiment bizarre. Je sais que son concours approche et qu'il travaille encore plus dur, mas ce n'est pas la seule raison pour laquelle il me repousse. Je crois qu'il y a quelque chose qu'il cherche à me cacher, et ça ne m'étonnerait pas que cette autre chose soit une fille. Il y a ces appels qu'il ne veut pas que j'écoute, ces SMS qu'il efface aussitôt après les avoir reçu et ces rendez-vous notés dans son agenda, avec un certain, ou une certaine C. Il n'écrit jamais le nom en entier, comme la plupart des jeunes New Yorkais quand ils se racontent des ragots. On a juste un initial, qui parfois est facile à deviner, mais qui comme dans ce cas, était un total mystère. Et je me demande qui peut bien être cette C, car je sais que c'est une fille. Il ne se donnerait pas tant de mal si ce n'était pas une fille. Donc voilà, il en fréquente une autre... Et ce n'est plus moi la cause de ses sourires... c'est elle. Ce n'est plus moi qu'il est pressé de revoir, c'est elle. Et chaque fois que j'y pense m'enfonce un peu plus dans une tristesse que je ferais mieux de cacher avant que tout le monde apprenne que ça ne va plus entre Jeff et moi. Le seul combat qu'il me reste, c'est celui contre les apparences. J'aimerais juste les sauver, et régler nos problèmes de couple avant que tout le gotha de Manhattan ne s'en empare.
Je ne sais pas comment on en est arrivé là... J'ai tour fait, tout donné pour lui. Et je suis peut-être trop bête de l'aimer encore de cet amour inconditionnel, alors que lui fricote avec d'autres filles. Mais je ne peux pas me séparer de lui. Oh ça non. Malgré cette C, je suis toujours cruellement accro à lui, et je vois maintenant toute l'étendue des liens qui me retiennent à lui. Et c'est tout aussi cruellement que je m'aperçois à quel point il est si facile pour lui de jouer avec moi, maintenant que je lui suis entièrement dévouée. Je ne sais pas ce qui fait le plus mal... cette obsession, ce besoin de lui et la façon dont il s'en sert, ou alors sa relation avec cette autre fille. Les deux... oui, les deux sont tout aussi douloureux. Douloureux comme son absence, demain, à ma grande soirée, où les apparences ne pourront pas tenir face aux regards satisfaits de toutes ces garces qui veulent ma peau.

A venir : About Clay